Crack. Mon poing s’enfonce avec violence dans l’estomac de mon adversaire. Il se plie en deux, titubant au milieu de ses deux comparses qui sont dans les vapes, le nez cassé, se tenant le ventre. Je lui attrape la tête avec mes deux bras, et lui enfonce mon genoux dans la gorge. J’entends sa respiration qui se coupe. Il se tient la gorge, tandis que ma botte vient cueillir son visage, l’envoyant voler quelques dizaines de centimètre en face de moi. Son corps s’écrase sur le sol de terre battue du terrain de sport, dans un nuage de poussière. Je m’approche de lui, agrippe son tee shirt et le relève quelque peu. Je suis folle de rage, j’ai envie que mon poing s’écrase encore et encore sur sa gueule. Mes yeux sont grands ouverts, mon regard lui fait comprendre que je vais lui arracher la tête. Je prends une grande inspiration saccadée par l’adrénaline pour lui hurler d’une voix saturée :

“Tu penses que ça m’amuse d’écraser des merdes comme vous hein ? Vous pensez que j’en tire quoique ce soit ? Hein ? Je te parle sale fils de pute, alors t’as pas intérêt à tomber dans les pommes. Que j’en revois un seul bully un élève du commun, et je vous jure que je vous crucifie tous les trois et que je vous fou le feu, Okay ?”

Je reprends ma respiration après m’être vidée les poumons. Je vois le type en face de moi tourner de l’oeil, alors je le balance par terre et me relève. D’un revers de la main, j’essuie le sang qui coule de mes lèvres à cause d’un sale coup que j’ai reçu. Je me craque les doigts d’une main, jetant un oeil au reste de mon corps. Les tartes que j’ai prises sont douloureuses, mais vivables. Je crache sur le sol à cause du goût de fer que j’ai dans la bouche. J’ai beau être victorieuse, je suis encore en pétard. J”ai réussi à me faire surprendre et prendre des baffes de la part d’un Alpha minable et de deux bêtas. C’est nul. Ca me rends dingue.

“Putaiiiiin” hurle-je pour me vider une nouvelle fois les poumons.

Au loin, je vois les surveillants arriver. Ca va être ma fête. Malheureusement, j’arrive pas à me calmer. Je suis tellement sur les nerfs que je pourrais les exploser. Cette idée me traverse longuement la tête, à mesure qu’ils s’approchent en courant. Mais cette idée s’estompe, ils n’y sont pour rien, et même si je ne les apprécie pas, je ne frappe pas pour rien. Ils incendient, me menacent d’expulsion, sans même chercher à savoir ce qu’il s’est passé, sans même chercher à comprendre la raison de cette rixte. Des réprimandes, encore des réprimandes. Tandis que d’autres surveillants arrivent s’occuper des trois mousquetaires, je suis amenée sous un torrent d’insulte jusqu’au bureau du directeur. J’ai l’impression d’être une taularde. Tout le monde me fixe, me juge. Ma respiration est bruyante, semblable à un grognement, j’ai envie de tous les exploser.

“Le directeur est pas encore là, il arrive, assieds toi reste calme.” me dit-il

Je m’assieds, faisant comprendre bruyamment que je n’avais pas besoin de surveillance. Je patiente de longues minutes et prends mon téléphone pour me vider la tête et faire redescendre la pression. 18h30, il est déjà tard. Après tout, il fait déjà presque nuit. Sinon, rien de nouveau. Je scroll sur différentes applications, avant de décider d’envoyer un message à Camille.

“Rentre tout seul ce soir, je me suis battue.”

Je fait enfin face au directeur. Je lis sur son visage qu’il semble agacé par la situation, ce qui se comprends. Ce sentiment est partagé. Je suis fixe face à lui, et je l’observe, un regard dur sur le visage. Mon arcade est brûlante, me faisant légèrement souffrir maintenant que l’adrénaline est partie. Le goût ferreux est toujours présent dans ma bouche, mais j’ai l’habitude, je ne me plains pas. Je le regarde dans les yeux, son regard est malsain, pour changer. En fait, ce type transpire le malaise, rien n’a une couleur normale, il bouge bizarrement, et s’exprime de manière bien trop doucereuse pour que ça soit rassurant. Il tente néanmoins de faire une blague, et comme d’habitude, ce n’est ni drôle, et ça ne fait pas descendre la tension non plus. Il analyse mes blessures, en conclut que ce combat à été une victoire écrasante. Bonne observation. Mais il enchaîne sur un sous entendu qui ne me plait pas. Je serre les poings, prends une grande respiration et me prépare à beugler dans ses oreilles avant qu’il ne me coupe. Je ravale ce que j’avais à dire dans un grognement. Je déteste les gens qui font ça.

Néanmoins, je suis surprise par l’une de ses remarques. Il me dit qu’il me crois et qu’il n’adhère pas et ne colporte pas l’image que je suis une mauvaise personne. Je dois avouer que celà me touche. Pendant tout celà je mets un sucre dans le thé qu’il me sert. Puis deux. Puis trois. Puis quatre. Et prends une pâtisserie aussi, que j’avale rapidement, presque sans la mâcher. Je le fixe toujours, tout en buvant d’une traite ce sucre au thé. Mais mes yeux s'écarquillent lorsqu’il aborde le sujet de ma punition, je ne sais pas trop quoi en penser. J’ai de nombreuses question, et je vais lui poser. Et tout à coup, il ferme sa bouche.

Je le regarde, quelques secondes. Je sens ma paupière droite se contracter à cause de l'agacement provoqué par cette discussion, et le questionnement qui va survenir à cause de sa longue tirade. Je soupire, bruyamment comme pour me calmer et ferme les yeux. Puis en une fraction de seconde, me lève, frappe sur la table et lui hurle au visage.

“Vous pensez vraiment que je taperais sur des petites merdes pour me défouler hein ? J’ai rien à gagner à écraser des types qui m’arrivent pas à la cheville, et si je voudrais vraiment me défouler j’exploserais que des Alphas de mon niveau. C’est juste que ça m’a fait péter un cable de voir des futurs Jokers bully des communs. Des crevures comme ça, c’est à cause d’eux que les gens ont plus confiance dans les héros, et à cause d’eux que c’est la merde à Laurel. Alors j’en ai attrapé un, et je leur ai dit de déguerpir ou j’explosais leur pote. Ils ont voulu régler ça aux poings, alors j’ai brisé le balais que j’avais dans la main sur la tête du premier et ai oblitéré les deux autres”

Je m’arrêtes quelques secondes, reprenant mon souffle après avoir lancée ma tirade d’une traite. Je détourne légèrement le regarde, et d’une voix moins agressive, mais d’un ton sec je lui demande.

“Pourquoi est-ce que vous entraîneriez une élève qui à des notes aussi inégales, des appréciations scolaires aussi négatives et une réputation comme la mienne ?”

Ma mâchoire se ferme en disant ça. Cette réputation me fait péter des cables, mais je sais que c’est celle que je me coltine. Je sais que dans mon dossier, néanmoins, un élément, en plus des matières de combat et manuelles, sauve mon dossier. Les appréciations sur le terrain.

J’ai peut être gueulé un peu fort. Mais bon, au moins c’était simple et concis. Lui, qu’est ce qu’il parle. Et bla et bla. Ce qui me dérange avec ce genre de discours, c’est pas qu’il dise des conneries, mais simplement qu’il répète des choses que je sais déjà. Et entendre quelqu’un enfoncer des portes ouvertes, c’est désagréable. Surtout quand on désire que ces portes restent fermées. Je sais très bien que mon pouvoir n’est pas terrible, mais je sais qu'à force de travail, de matériel et d'ingéniosité, je serais plus forte que n’importe qui. Je sais que j’évolue, même si c’est lent et infime. Mais par exemple, cette semaine je ne me suis déboitée le bras que trois fois en s'entraînant avec mes gants, contre 8 la semaine d’avant. Mon corps s'adapte.Avant, utiliser mes rollers pendant une heure me donnait d’horribles courbatures, maintenant, je peux l'utiliser sans y faire attention et pendant une dizaine d’heures. En Fait, j’évolue, mais comme le soulève le directeur, je suis obligée de travailler plus longtemps et intensément que les autres pour rester au niveau. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle je me blesse autant, je suis obligée de pousser mon organisme dans ses derniers retranchement pour gagner une once d'efficacité.

Néanmoins, la raison qu’il avance en réponse à ma question me convient. Et même plus, elle me fait plaisir. Ce serait mentir de dire que des compliments et les notifications de mes efforts ne me touchent pas. De plus, entendre le directeur en personne me dire que j’ai un immense potentiel, plus que les autres même, m’arrache un petit sourire gêné. Il me parle de son pouvoir, ce qui ne fait que confirmer ce qui est écrit dans la sacro-sainte encyclopédie qu’on tient avec Camille. Mais honnêtement, l’idée d’avoir un entraînement privilégié avec un pro me tente beaucoup. Même si ça n’améliore pas mon pouvoir, ca me rendrait plus efficace en toute situation. Et je pourrais enfin m’approcher du niveau du Laughing Jack. Il me tends un papier, une décharge à la con. Je le regarde, arque un sourcil. Je veux dire, je passe littéralement ma vie à me blesser dans cette école. Mais bon, c’est de la paperasse.

“Bien sur que je serais la a 20h, z’avez cru quoi ?”

Je signe, pose le papier sur la table, me lève, et part de la pièce. Sur le chemin, j’envois un message à Camille pour lui expliquer la situation. Puis je descends les escaliers, pour me mettre en tenue de sport. La sup n’a pas d’uniformes, alors on vient comme on veut. Moi, c’est un ensemble tee shirt, veste, short rouge de marque, avec des pompes qui coûtent bien trop cher. En même temps, je les utilise au bas mot entre 2 et 5h par jours, donc heureusement que c’est de la qualité. Je passe rapidement à la planque, me chercher quelque chose à manger et me poser une petite heure avant le début de l’entraînement. Des restes du resto des mes darons. Une tuerie. Je ne m’attarde pas, et vers 19h30, je pars m’échauffer. Une dizaine de tours de terrain. Une série de pompes, de tractions, un peu de souplesse car j’aime ça, et il est déjà l’heure. 20h, je vois le directeur arriver.

“Bon. Je suis là. On commence par quoi ?”