La conduite acrobatique est un cours que je qualifierais de détente. Je me prends pas la tête, c’est amusant, excitant. Une bouffée d’adrénaline pour le premier jour d’une semaine qui s’annonce pénible, et une récompense pour avoir survécu une fois de plus à la lenteur des cours de défense. On apprends à conduire dans des situations vraiment cool. Aujourd’hui j’ai eu le droit à la course poursuite terrestre contre un van volant armé jusqu’au dents. Les courses poursuites, c’est ce que je préfère. Grâce à mon pouvoir, j’ai juste besoin de m’approcher assez d’un véhicule pour l’aborder, et ensuite, il s’arrête tout seul comme un grand.  Étonnamment, c’est un cours ou mes notes sont plutôt bonnes, et surtout dans la moyenne. La réalité c’est que c’est quelque chose que j’apprécie, donc je fait un minimum d’effort. Ca demande de la réactivité et un goût du risque. J’aime ça quoi, et sans parler de mon don qui facilite tout ça. De plus, la prof est une des rare à ne pas m’avoir en grippe.

Aujourd’hui lorsque le cours se termine, je commence à me diriger vers les vestiaires pour prendre une douche et donc fait signe à Camille que je le retrouverais tout à l’heure, comme tout les soirs. Et c’est donc en silence que je me déshabille, ne tentant aucunement de converser avec les autres filles de ma classe. Elles ne sont pas méchantes, loin de là. En réalité, une bonne partie des élèves de cette école est profondément bien attentionnée. C’est juste que j’ai tendance à toujours entrer dans la confrontation, et que j’en soit l’origine ou non, ca se termine rarement bien. Cela dit, dernièrement, cela est plus rare en classe. Même si je me bats toujours autant à l'extérieur, je suppose que l’accentuation du rythme de mes missions, les séances que la psy, les entraînements avec le directeur pompent assez d’énergie pour que je n’ai pas la force de me prendre la tête avec les autres élèves. J’arrive à mon casier, et commence à retirer mes vêtements et les balancer dans mon sac de sport, avant de me diriger vers la douche. D’un pas las, je rentre et commence à faire couler une eau brûlante. Brûlant est ici un euphémisme, ma peau prends rapidement la couleur de mes cheveux et de mes yeux. Néanmoins, c’est un plaisir éphémère auquel je m’adonne, car je ne reste jamais bien longtemps sous l’eau. Alors au bout de quelques minutes, je coupe l’eau, sans réellement toucher au robinet. Des gouttes ruissellent le long de mes cheveux, tandis que ma de ma peau s’échappe de la vapeur. Je m’apprête à sortir mais une discussion au fond de la pièce me fait me rétracter. Visiblement, les dernières filles qui ne sont pas encore partie parlent de moi. Mais étonnement, ça ne semble pas en mal. Je parviens à comprendre que ca parle encore de cette histoire de nudes volées, qui m’avaient valu une petite baston juste avant de rencontrer la psy. Et pour mon plus grand bonheur, ça semble réglé. Je serre le poing, un sourire aux lèvres. La justice triomphe toujours.

Je patiente encore quelque minutes, afin d’être sûre d’être la dernière dans les vestiaire avant de sortir. Je me sèche les cheveux, et m’habille d’une tenue plus légère, plus “cool”. Un long tee shirt rose clair à l'effigie de pain, ou d’ailleurs le motif a presque totalement disparu avec le temps. Un short, des collants, et ma veste verte kaki. J’attache ma tignasse mal coiffée et mal séchée en queue de cheval, avant de recevoir un message. C’est Camille, il m’attends. C’est vrai que j’ai tardé en vérité.

“Ouais tu commences pas sans moi ! ૮( ᵒ̌▱๋ᵒ̌ )ა”

J’attrape mes deux sacs, et me dirige d’un pas rapide vers les bâtiments désaffectés. Je suis d’une super bonne humeur. Avant ma douche, j’avais eu un petit coup de mou que j’ai attribué à mes nuits courtes, et mon entraînement intense, le tout couplé à mes journées chargées. Mais le fait d’entendre un compliment, et de savoir que je vais passer la soirée avec mon meilleur pote, ca me donne presque envie de me battre.

Je grimpe les escaliers un à un, nécessitant de traverser tout l’étage de temps en temps, à cause de l’état de certaines des marches. Je me faufile dans notre grenier secret, et ouvre la porte avec mon pouvoir. Cette porte, on y a passé vraiment beaucoup de temps à la fabriquer, mais ça valait le coup. J’ouvre la porte d’un grand coup et  je vois Camille affalé sur le canapé, en train de bouffer. Des pâtisseries je crois.

“Au moins, c’est pas de la terre” me dis-je


“Ca fait trois jours que j’ai pas été collée. Je deviens une putain d’élève modèle c’est abusé.” dis-je d’une voix forte.

Je me dirige vers Carl, enjambant la table basse, ralentissant volontairement devant la télé pour le faire perdre. Puis je pousse ses jambes, le forçant à se rassoir avant de m’affaler sur notre vieil ami commun.

“Mec t’es sérieusement en train d’entraîner ? Genre t’as besoin de ça pour me battre ? T’abuses putain …”

Quelques secondes s’écoulent, alors que je continue de lui expliquer mon mécontentement face à ce genre de comportement abusif cherchant à me rabaisser sur l’un des rare domaines que je ne maîtrise pas. Et puis, mon nez capte quelque chose. Une odeur que j’apprécie beaucoup trop pour mon propre bien. Du sucre. Je retourne la tête, et aperçoit une boîte, estampillée de la boulangerie de la famille de Camille. Ni une ni deux, je saute pour l’attraper, m’éffondrant sur son ventre, lui coupant le souffle. D’un mouvement rapide, agile et propre à l’étoile montante crimson viper j’enfonce ma main dans cette jolie boîte et en sort … un macaron. Pinacle de la pâtisserie sucrée et colorée, la sacralisation des machins qu’on peut manger en une fois. Mon regard brille, tandis que la pâtisserie entre dans ma bouche grande ouverte. Bordel c’est si bon.

“Ta mère est une déesse que nous ne méritons pas, c’est la légende de la pâtisserie putain.”

Toujours affalée sur Camille, je mâche, et la bouche pleine, je lui demande :

“On à dit on faisait quoi aujourd’hui déjà ? J’ai oublié !”